Jessika Laranjo

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Jessika Laranjo est née en 1975 à Malo les Bains. Elle vit et travaille à Dunkerque. Artiste plasticienne, son activité s’articule entre sa pratique artistique, l’organisation de projets collectifs et une pratique d’intervenante avec des publics variés. Elle développe essentiellement ses travaux par le biais de la vidéo et d’installations in situ mais utilise également de manière ponctuelle, la photographie, la mise en scène, le dessin, la performance et le graffiti. Tout ceci continuellement en écho à une pratique quotidienne de l’écriture et du dessin comme modes de pré maturation de l’oeuvre.

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Jessika Laranjo constitue méticuleusement une sorte de patrimoine démonstratif et trompeur à échelle humaine dont le détonateur est le spectateur ; spectateur qui enclenche le dessein de l’œuvre par son expérience, sa déambulance.

Un patrimoine suranné et ‘Hors Service‘ entre acteurs et décors qui engage avec ambivalence la question de l’aliénation et de ses pendants récurrents : la manipulation, l’abnégation, le renoncement, la simulation, la colère, le dégoût, l’aigreur.

Plus exactement, on trouve à l’épicentre de son écriture et de sa pratique, une interrogation autour de l’identité et de l’appartenance, de la représentation de soi, du monde, de soi au monde. Ce constant et schizophrénique basculement entre la pression sociale, le convenu, la raison utile et l’urgence de soi, la quête de sens, la libre pensée qui génère cette impression d’endormissement des consciences. En soi, un simple immobilisme, un statut quo, l’incapacité à réagir de peur de perdre le peu que l’on possède déjà quand la précarité s’est insinué urbi et orbi, curieusement, au milieu de monceaux d’objets ‘indispensables’, véritables prétextes au désir et pourtant, tous plus négligeables les uns que les autres au final pour le proprement humain.

Le propos de ce travail convoque une thématique vaste cependant incarne plus précisément d’un projet à l’autre, selon le contexte par exemple ; les projets étant, la plupart du temps, conçus ou déployés in situ.

La valeur prospective, contemporaine émane de l’amplitude du propos (sociologique) et de l’ambiguïté récurrente utilisée pour le questionner, qui permet la caricature virulente comme la poésie doucement absurde, l’à peu près comme le catégorique.

C’est concrètement, esthétiquement, mis en œuvre par des métaphores, des parallèles et nombre d’observations tendancieuses faisant référence à la manipulation des images collectives (le beau, l’emblème, la norme, le paraître) et aux idéologies notamment consuméristes ou religieuses (la félicité dans le confort et l’accumulation de biens / le statut, l'exister par la situation professionnelle / la culpabilité ménagée par la morale judéo-chrétienne encore omniprésente, etc.).

On navigue dans une projection du monde où règne le mimétisme, le pastiche, la convenance et le joli jusqu’à l‘écoeurement, jusqu’à l’étouffement. A l’image de notre hyper monde capitaliste. Un « hyper réel » dixit Baudrillard dans ‘Simulacres et simulations’* où nous faisons tous office de figurants malgré nous. Ce voile devenu monde constamment alimenté par des notions devenues équivoques voir indigestes (le désir, le plaisir, le bonheur, l’épanouissement, la réussite) à force d’être plaquées sur tout, comblant ainsi mièvrement nombre d’interstices vivaces : le territoire des inclinations, projections et pulsions évacuant ainsi l’imaginaire propre à chacun.

L’alternative sensible et intellectuelle ici, c’est le basculement ; ce petit basculement qui dépasse l’aberration des rôles à tenir : des notions si peu convoquées qu’elles en deviennent précieuses, poétiques : le vide, le rien, la lenteur, le ridicule, le disharmonieux. C’est le fil du rasoir, cette vision où cohabite des choses et leurs contraires : le confort et la précarité (la précarité dans le confort, le confort dans la précarité), le ringard et le sublime, le grotesque et le raffinement, l’inutile et le vital, le ratage et le succès. Ce paradoxe mis en scène comme un écho grinçant à la médiocrité des conditions alimentées par le marketing de supermarché; mais également comme défouloir, comme alternative poétique à ce matérialisme forcené.

Ce travail, entre coup d’éclat et coup de gueule, réengage ce décalage entre le beau et le sens, vis-à-vis de cette question récurrente de l’esthétique comme illusion et du sens qui pour se faire tangible doit s’y incarner. Il invite le spectateur à se demander quels sont nos emblèmes aujourd’hui ; nos alimentations en somme, ce en quoi ils nous subliment ou nous vulgarisent, dans cette société qui vante avant de rendre compte, qui répand avant de donner le goût.

Un monde miroir ‘Hs‘, acide et mielleux qui oscille entre images clichés ratées, succédanés poétiques inespérés et délires cyniques. Dans la série vidéo ‘Les indigents ‘ particulièrement, le fil de l’action est ténu, quasiment inexistant, comme pour contrer cette souveraine raison utile ; l’image est mise en scène dans ce rapport de décalage et nourrie par le travail sonore, évitant ainsi l’illustration. Le moindre geste y est sublimé comme si cela pouvait rappeler l’intérêt de l’humain, ré engager la question de la considération pour chacun, de l’être au mépris de l’apparence.

Dans la série HS.Land (la partie jouée par Jessika), c’est l’autre versant, celui où l’humain n’existe plus qu’à travers ses mots qui s’emballent, où il ré intègre son rôle malgré lui : sa mascarade personnelle, ses leurres ou sa bêtise. Des discours construits, aussi violents que maladroits déchirent cet aspect du monde qui se veut à l’image des plateaux de télévision où l’individu se noie imperceptiblement.

Plus particulièrement depuis 3 ans, Jessika Laranjo aborde plus précisément les questions de la norme et de la marginalité, du refus et de l’acceptation, de la colère et de la résistance comme un entre-deux entre le convenu et l’urgence ; engageant des formes et des présences « défouloir » allant du cumul insensé d’ornements et/ou d’objets à la mise en scène d’expressions urbaines iconoclastes et vandales.

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*Selon Baudrillard, le monde dans lequel nous vivons a été remplacé par une copie du monde, nous y recherchons des stimuli simulés et rien de plus. Baudrillard emprunte à Borges l’exemple d’une société dont les cartographes ont créé une carte si détaillée qu’elle couvre les choses même qu’elle a été conçue pour représenter. Quand l’empire décline, la carte se fond dans le paysage, et il ne reste ni la représentation ni le restant vrai, mais juste l’hyper réalité.

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Jessika Laranjo